Le territoire recomposé. Conscience géographique et expériences de l’espace dans les récits de la France défaite (1940)
Résumé
Cette thèse porte sur les représentations du territoire français dans les récits de l’exode et de la débâcle de 1940, à un moment où la France connaît une crise majeure, tout à la fois politique, militaire et migratoire. Devant l’invasion des troupes allemandes, une grande partie du peuple français part sur les routes, accomplissant une traversée du pays parfois très étendue.
À partir d’un corpus littéraire comprenant des romans (Aragon, Gracq, Némirovsky, Robbe-Grillet, Simon), des témoignages (Bloch, Saint-Exupéry, Sartre) ou encore des Mémoires (de Gaulle), on entend reconsidérer la poétique du récit de guerre sous un angle géographique et contribuer à l’histoire des représentations spatiales au XXe siècle. Interdisciplinaire, la démonstration se situe au croisement de la littérature (par son matériau), de l’histoire (par son contexte) et de la géographie (par son approche).
Autrices et auteurs traduisent dans leurs textes l’expérience d’une perte de conscience géographique, tout en la réagençant à travers une diversité de ressources thématiques et formelles, narratives et stylistiques. L’enjeu de la thèse tient à saisir cette recomposition du territoire par l’écriture, en lien avec celle qui affecte concrètement la France : la défaite de 1940 redessine en effet la carte du pays, bientôt morcelé en plusieurs zones et coupé en deux par la ligne de démarcation. « En étrange pays dans [leur] pays lui-même », les auteurs réagissent dans bien des cas par la construction d’une patrie intérieure. La formalisation de leur vécu, par le recours à la fiction ou par la reconstitution historique des faits, influence la mémoire collective de l’événement.
Abstract
This thesis focuses on the representations of French territory in the accounts of the exodus and the debacle of 1940, at a time when France was experiencing a major political, military and migratory crisis. Faced with the invasion of German troops, a large part of the French people left on the roads, crossing the country sometimes very extensively.
From a literary corpus including novels (Aragon, Gracq, Némirovsky, Robbe-Grillet, Simon), testimonies (Bloch, Saint-Exupéry, Sartre) or even memoirs (de Gaulle), we intend to reconsider the poetics of war story from a geographical angle and contribute to the history of spatial representations in the 20th century. Interdisciplinary, the demonstration is located at the crossroads of literature (by its material), history (by its context) and geography (by its approach).
Authors translate in their texts the experience of a loss of geographical consciousness, while rearranging it through a diversity of thematic and formal, narrative and stylistic resources. The challenge of the thesis is to grasp this recomposition of the territory by writing, in connection with that which concretely affects France: the defeat of 1940 in fact redraws the map of the country, soon fragmented into several zones and cut in two by the line of demarcation. “In a strange country in [their] country itself”, the authors react in many cases by building an inner homeland. The formalization of their experience, through the use of fiction or the historical reconstruction of facts, influences the collective memory of the event.
Jury
Marie-Hélène Boblet, Professeure, Université de Caen - Examinatrice
Jean-Louis Jeannelle, Professeur, Sorbonne Université - Co-directeur
Jean-Yves Laurichesse, Professeur, Université de Toulouse - Président
Pascal Ory, Professeur émérite, Université Paris 1-Panthéon Sorbonne - Examinateur
Nathalie Piégay, Professeure, Université de Genève, - Rapportrice
Françoise Simonet-Tenant, Professeure, Université de Rouen - Co-directrice