Le Lyrisme de Jean Genet

Auteur de la thèse: 
Email auteur: 
corradojc@gmail.com
Directeur de thèse: 
Louette Jean-François
Université: 
Sorbonne Université
Année de soutenance: 
2020

Résumé

 

 Dans leur très grande majorité, les critiques qui se sont intéressés à l’œuvre du premier Genet – celui des romans et des poèmes – ont employé le terme de lyrisme. C’était le cas de Sartre dans son Saint Genet, et l’on retrouvera ce terme chez Florence Leca, dans les travaux de Nathalie Fredette, Mairéad Hanrahan, Pierre-Marie Héron, ou, parmi tant d’autres, Lucien Goldmann. Surtout, Genet parle lui-même de son lyrisme, et en propose différentes définitions, qui ne sont pas tout à fait similaires, dans Journal du voleur et dans L’Enfant criminel. S’il y a consensus pour reconnaître que l’écriture de Genet est lyrique, les critiques qui ont employé le terme se sont toujours dispensés de le définir clairement, au point que la notion paraît plus évaluative que descriptive. Il faut dire que les théories du lyrisme sont très diverses – des approches formelles, énonciatives ou thématiques s’opposent chez les théoriciens – et il ne s’agit pas pour nous d’en sélectionner une qui serait plus juste que les autres – ce qui reviendrait à faire comme si la meilleure théorie était simplement celle qui correspond le mieux à l’œuvre de notre auteur. Nous prenons le lyrisme non pas comme un genre ou comme une théorie mais plutôt comme une tradition littéraire et académique. Notre étude porte essentiellement sur le cycle autobiographique (Notre-Dame-des-Fleurs, Miracle de la rose, Pompes funèbres, Journal du voleur) et les poèmes – les ouvrages relevant de l’écriture du moi. Nous ne nous interdisons pas, cependant, de faire allusion à d’autres œuvres, tout particulièrement les pièces de théâtre qui sont les plus proches des romans par leurs thématiques et la période à laquelle elles ont été écrites : Haute Surveillance et Splendid’s.

    Notre travail s’organise en quatre grandes parties. La première porte sur la question du sujet, du moi. Nous y montrons que le roman devient prétexte pour exprimer le sujet, que l’histoire n’est qu’un point de départ pour mener vers du discours. Nous montrons comment le narrateur déborde sur le récit de la vie de ses personnages, en brouillant les niveaux diégétiques (ce que Genette appelle une « métalepse »). Tout dans le récit renvoie au Je du narrateur.

    La deuxième partie porte sur la littérature amoureuse, thématique traditionnelle de l’écriture lyrique. Genet emprunte au modèle de la fin’amor, hérite également du pétrarquisme – il se réclame de Ronsard – et déplace la tradition du lyrisme amoureux vers une littérature homosexuelle volontiers pornographique. Cette partie propose une analyse du désir genétien – désir omniprésent et qui ne possède pas de structure fixe (chez Genet, on aime plusieurs personnes en même temps, et on aime un homme au travers d’un autre homme), de sorte que les théories de la machine désirante de Deleuze et Guattari, tout comme la notion de désir pur élaborée par Lacan, peuvent nous aider dans notre approche. Nous nous intéressons également à la reprise du modèle de l’amour mystique et à la notion de sentimentalisme : Genet est un auteur sentimental qui rencontre le pornographe.

    Notre troisième partie porte sur l’éloge, la célébration, l’idéalisation. Genet fait l’éloge de personnages qui sont toujours mauvais, de sorte que l’éloge est tributaire d’un retournement des valeurs, mais devient aussi éloge creux, vide, parce que Genet ne nous permet jamais d’oublier que ceux qu’il célèbre ne valent pas grand-chose, et l’éloge se réduit ainsi à une célébration de la célébration, ou une célébration du célébrant capable de faire l’éloge même de ceux qui n’en valent pas la peine. C’est aussi dans cette partie que nous abordons la question de l’hyperbole, des procédés rhétoriques de l’exagération et de l’emphase.

    La dernière partie fait plus de place à la stylistique, elle porte sur le dire genétien. Nous y étudions par exemple la phrase genétienne en essayant de montrer comment celle-ci se développe à outrance, et nous en proposons une typologie sur le modèle des travaux de Leo Spitzer sur Proust. Nous y étudions également l’ethos du poète contre celui du romancier : Genet ne cesse d’opposer son travail à celui du romancier, et construit une image auctoriale de poète au travers d’une œuvre qui, pourtant, se rapproche bien davantage du genre romanesque.

 

Jury

 

M. Jean- François Louette (Sorbonne Université, directeur)

Mme Laurence Campa (Université de Paris Nanterre, rapporteure)

Mme Marie-Claude Hubert (Aix-Marseille Université)

M. Jean-Louis Jeannelle (Sorbonne Université, président)

M. Gilles Philippe (Université de Lausanne, rapporteur)

 

Lien

https://www.theses.fr/2020SORUL112


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